Pourquoi une élégante et un guitariste ne peuvent pas jouer de piano
Et oui il y a des choses qui ne sont pas compatibles.
Joséphine De Laroche Minois est une femme très élégante et habituée aux soirées mondaines digne de notre bien aimé agent secret 007. Jean-Tanguy, lui, est un guitariste classique qui aimerait bien se mettre au piano, mais sans arrêter de jouer de son premier instrument.
Mais qu’est-ce que ces deux personnages peuvent bien avoir en commun ? Une chose qui les empêche de jouer du piano car elle ne leur permet pas de prendre contact avec le bout de leur doigt.
La pulpe du doigt
Dans le jargon du pianiste, la partie du bout du doigt qui doit rentrer en contact avec le clavier est appelée la pulpe du doigt. C’est la partie de chair qui se trouve entre l’os du bout des doigts et la peau, entre le sommet de l’ongle et ce que l’on appelle l’empreinte digitale. Je l’ai entourée au stylo sur cette image.
Vous pouvez facilement la sentir si vous cherchez le juste milieu entre cette position de doigt trop verticale
Et cette position trop à plat
La bonne position du doigt sur la touche :
Pourquoi est-ce si important de sentir la pulpe.
Parce que c’est la partie la plus charnues du bout du doigt, et que de cette façon elle apporte un immense confort et une très bonne assise à la main. C’est comme le pied du danseur. S’il ne le sent pas bien, la stabilité de l’ensemble de son corps en sera fragilisée. Pour que vous vous sentiez sur chaque touche comme dans un fauteuil confortable, il faut que ça soit cette partie qui entre en contact avec le piano. Toute la construction et la structure de la main dépend de la qualité de ce contact. C’est le seul endroit de votre corps qui touche le piano.
Ne dit-on pas d’un pianiste de légende qu’il a un “toucher extraordinaire”? Chercher à devenir un bon pianiste est donc chercher le plus possible à soigner ce toucher. Pour que vous aimiez le piano et qu’il fasse partie de votre vie, vous devez le toucher avec sentiments, sensations et amour ! Cela peut vous paraitre un peu exagéré, mais c’est ce qui va faire toute la différence entre un bon ou un pianiste commun : La finesse de son toucher.
Alors vous allez me dire : mais quel est le rapport avec les deux personnages dont nous parlions au début ? Et bien ce sont leurs ongles ! Madame De Laroche Minois prend soin de se laisser pousser de beaux ongles bien longs et de les colorer chaque jour d’une couleur qui sublimera ses mains. Jean-Tanguy, lui, a besoin d’une main aux ongles courts (celle qui appuie les cordes sur le manche), et d’une autre aux ongles très longs pour accrocher ses cordes. Bien sûr je ne parle pas ici des guitariste qui jouent au médiator (petit accessoire en plastique dur que l’on tient entre le pouce et l’index pour faire sonner les cordes de guitare) et qui n’ont donc pas besoin d’avoir des ongles longs.
Et oui Mesdames, je suis désolée… si vous voulez jouer du piano et progresser, il va falloir renoncer à la beauté de vos ongles ! Je suis très claire : non non, il n’y a pas de négociation possible.
OU
Pourquoi les ongles empêchent-il de sentir la pulpe ? Parce qu’ils obligent votre doigt à se mettre beaucoup trop en arrière de cette partie qui nous intéresse, l’obligeant à s’allonger, ce qui lui retire sa vélocité et sa puissance.
Un autre inconvénient à jouer avec les ongles longs
Le bruit ! L’ongle va frapper à chaque note la surface de la touche, provoquant un petit “tic”. Ça me rappelle mon père, qui n’était absolument pas gêné par cela, car il s’était habitué. Je trouvais ça incroyable que ça ne le gêne pas ! Mais peut-être que comme beaucoup de pianistes, il n’écoutait pas vraiment ce qui sortait du piano, préférant se concentrer sur ce qu’il entendait dans sa tête… 😉 Honneur à lui et à sa passion du piano ! C’est grâce à lui que je vous parle aujourd’hui !
Des différences morphologiques
Pour être sure de bien me faire comprendre dans ce qui va suivre, un peu de vocabulaire :
J’appelle “la ligne de sourire” la ligne qui se trouve entre la zone rose de l’ongle de sa partie libre et blanche (normalement! et pas rose comme le schéma ci-dessous…).
Les personnes qui ont tendance à laisser pousser leurs ongles ont cette ligne qui avance beaucoup trop haut. Et d’autres ont naturellement cette adhérence de l’ongle à la peau qui monte très haut comme ci-dessous.
Merci Mathilde de m’avoir prêté ta main !
Dans ces deux cas, il est important de couper régulièrement la partie libre de l’ongle de manière à la faire disparaitre. Et ceci tous les 5 à 8 jours en fonction de votre vitesse de repousse. Parallèlement à cela, passer très régulièrement la pointe d’une lime à ongle comme vous le faites pour retirer la saleté. Ces deux actions permettent de faire reculer progressivement la ligne de sourire. Attention ! Ne vous faite pas mal. C’est un travail à long terme. Et quand je dis de couper court, ce n’est pas aller jusqu’au sang tout de même. Le fait de couper régulièrement suffira à faire reculer. Regardez les gens qui se rongent les ongles, si vous regardez leurs mains, ils ont en général des ongles assez courts…
Bon je ne dis pas qu’à partir de maintenant il faut vous ronger les ongles hein ! Ce n’est pas une bonne idée. Et nous n’avons pas besoin de les avoir si courts !
Pour savoir si vous avez les ongles suffisamment courts, regardez vos ongles de face. Si vous pouvez voir un peu de chair au-dessus de la courbe fraichement coupée de vos ongles, ils sont suffisamment courts.
Si en revanche vous ne voyez pas de chair par dessus, ils sont trop longs. Il va donc falloir faire reculer la ligne de sourire. Par chance vous n’aurez pas forcément à le faire pour tous les doigts.
Oui mais…
Alors bien sûr, vous connaissez peut-être des gens qui jouent bien, et qui ont des ongles longs. Mais ces personnes n’iront certainement pas aussi loin équipés de cette façon que s’il les coupaient. Oui il jouent des notes et font leur petit effet, mais ont-ils vraiment la finesse que vous voudriez avoir, écoutez bien…
Si pianoter quelques notes vous convient, alors vous pouvez rester avec les ongles longs ! Que les guitaristes se rassurent donc. Vous avez parfaitement le droit de faire du piano juste comme un hobby mais sans prétention. Mais il faudra renoncer à un paquet de morceau connus et splendides qui font la gloire du piano. Il est clair que pour jouer quelques accords d’une chanson et s’accompagner en chantant, se couper les ongles n’est pas indispensable. Et une fois que vous connaitrez votre morceau fétiche, vous pourrez jouer cet unique morceau pendant des années. Mais si au bout d’un moment vous vous sentez frustré, et que vous aimeriez passer à la vitesse supérieure, repensez à cet article avant de vous y remettre !
Pour faire connaitre mon blog, j’ai besoin de vous. Si vous avez lu jusque là, c’est que son contenu vous a intéressé. Je vous serais très reconnaissante de partager cet article sur les réseaux sociaux !
Depuis que j’ai commencé le piano il y a 2 ans, c’est ma plus grande peur ! Je suis un homme avec une « ligne de sourire » très très avancée, qui dépasse largement ma pulpe, plus loin que la photo de Mathilde que vous présentez, et je vois bien que dans les passages rapides ça me bloque totalement et me donne en plus une position désastreuse, de mauvais automatismes et une mauvaise technique globalement. J’ai la position « trop à plat » que vous montrez car je n’ai pas le choix, même si je sens que mes doigts veulent faire autre chose.
Mon prof de conservatoire dit en gros qu’on s’en fout, mais je vois bien que ça va me bloquer, je me demandais justement si je devais commencer à me ronger les ongles ce que je n’ai jamais fait de ma vie, je compte tenter de limer dans la partie rose, cela devient un peu douloureux mais je n’ai pas le choix je pense.
Tout ça pour dire, merci d’évoquer ce sujet, et c’est fou comme des détails peuvent changer la vie d’un pianiste (ou autre musicien) et comme trouver un bon prof est difficile
Merci Marie-Cécile pour cette pertinente description. J’entends souvent parler de l’importance de bien sentir la pulpe des doigts, mais en tant que pianiste, plutôt autodidacte, je ne visualisais pas vraiment cet endroit précis. Maintenant je le saurai pour toujours! Pourvu que ma vie de retraitée soit longue, longue, longue…Ce sera très pour la petite valse de Chopin en la mineur que nous explique si bien.
Intéressant….et tjrs très pédagogue…les notes communes…au microscope…prendre le temps de l’analyse….prendre le temps de rechercher l’HARMONIE…..merci pour cette « analyse »..
Quand j’ai passé de la guitare au piano, j’aurais pas pensé que ce détail était aussi important! Mais oui en tant que guitariste d’origine, il faut comme le piano sentir la pulpe du doigt! Mais c’est bon, M-C! Je corrige ma techniques!